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Debout sur le Zinc - 17 novembre 2004

Propos recueillis par Romain Marchal à Paris.

Ils sont devenus incontournables dans le milieu de la chanson française. Les sept musiciens de Debout sur le Zinc ont su creuser leur trou (forts de quinze années d'expérience) dans le milieu de la scène française, où l’on croise aujourd’hui du bon… et du moins bon.

Inlassables tourneurs (plus de quinze dates par mois), ces stakhanovistes et néanmoins véritables défenseurs du «spectacle vivant» enchaînent lesscènes avec toujours la même énergie. Leur troisième album, «Des singes et des moutons» (Wagram), petite perle dans le milieu musical français, révèle l'étendue de leur talent : plus rock et plus sombre que leur deux opus précédents, et toujours cette émulsion réussie entre des influences musicales que tout sépare. Debout sur le Zinc fait vibrer le public et insuffle une énergie qui ferait pâlir d'envie les icônes rock des années 70...

Nous les avons rencontré après le concert qu'ils ont donné le 17 novembre dernier à la Maroquinerie. L'occasion pour Simon, chanteur et violoniste du groupe, de nous en dire un peu plus sur «DSLZ».


Alors, pour commencer, la question qui doit t'être posée à peu près tout le temps, comment s'est passée la rencontre entre les musiciens ?
On est tous originaires des Yvelines. On s'est rencontrés à Rambouillet, en fait. Romain (clarinette) et Fred (accordéon) sont des copains de très longue date. Des potes de lycée, en fait. Christophe (guitare) et Momo (batterie) avaient un groupe de rock ensemble. Nous, on avait fondé un groupe de folk celtique. A un moment, on a décidé de fusionner les deux. Et ça a donné Debout sur le zinc.


Justement, vous avez des influences musicales différentes. Comment avez-vous réussi l'émulsion ?
C'est vrai que nous avons énormément d'influences, du rock au reggae, en passant par la folk et le classique (j'ai fait le Conservatoire). Cette émulsion s'est en fait créée toute seule. C'est aussi ce qui fait que notre musique s'est enrichie. Il n'y a pas eu de prise de tête pour déterminer quel style aurait le dernier mot. Chacun a amené sa sensibilité. En fait, nous nous sommes rassemblés autour de notre amour pour la chanson française.

Aujourd'hui, il y un véritable renouveau de la chanson française, avec beaucoup de groupes émergents. C'est cette originalité qui a fait que vous sortez du lot ?
C'est surtout notre ancienneté et notre expérience des concerts. Nous avons été parmi les premiers avec les VRP et les Têtes Raides à faire de la chanson française, les gens ont tendance à l'oublier. Notre groupe ne date pas d'hier. On évolue musicalement comme on peut. Mais c'est tout de même, je pense, notre expérience des concerts qui fait qu'on se démarque.

C'est vrai que vous tournez beaucoup, environ 15 dates par mois. D'ailleurs vous jouez autant dans les MJC de province que dans les grandes salles parisiennes comme l'Elysée Montmartre. C'est un choix délibéré ?
Pas vraiment. C'est la vie de tournée en fait. On peut un jour jouer pour un festival devant 6000 personnes, et deux jours plus tard jouer dans une salle des fêtes en plein Loir-et-Cher. C'est ce qui fait le charme des tournées. Chaque soir reste différent, en raison de notre forme, du public, de la région, de la salle... On ne peut pas se lasser. Sauf si peut-être nous ne faisions que des grandes salles...

Vous avez commencé à tourner en dehors de la France aussi. Notamment en Russie. Pourquoi ce pays précisément ?
Notre régisseur avait des contacts là-bas. C'était un peu un rêve de gosse que de voyager dans des pays aussi surréalistes. La Russie, c'est Chicago en Lada. La prohibition avec la vodka. En plus, l'accueil a été extraordinaire. Quand un groupe français passe là-bas, c'est un petit évènement : il y a tous les francophiles, ceux qui aiment la musique qui bouge... On a fait autant les grandes salles que les tous petits bars enfumés. La Russie, c'est un souvenir unique. Les tournées comme ça, c'est ce qu'il y a de plus fatiguant, mais aussi de plus exaltant. On espère en faire de plus en plus. On veut notamment partir au Québec.

Votre troisième album, «Des singes et des moutons», vous l'avez autoproduit. C'était important pour vous ?
Absolument. Disons que nous étions à l'étroit dans notre ancienne boîte de production. Nous avons eu quelques problèmes avec elle... Donc, on a décidé de partir. Pour ce troisième album, on s'est endettés, on a emprunté aux parents, aux bars... On a pris des risques, mais on ne regrette absolument pas notre choix. On est beaucoup plus libres aujourd'hui. Je suis d'autant plus fier de ce disque que l'on a réussi à y retranscrire notre énergie, qui ne transpirait pas assez dans nos deux précédents albums. Cette expérience va faire des petits. On a déjà envie de sortir un quatrième album dans la même veine. On a déjà quelques idées. Il nous faudrait un peu plus de temps pour s'y mettre réellement, mais l'envie de composer est là. Ce serait bien aussi de sortir un live un de ces jours. Peut-être même un DVD...

Qui compose ?
Nous sommes trois auteurs-compositeurs à la base : moi, Christophe et Romain. On propose nos chansons au groupe, et c'est à lui de les accepter ou de les rejeter. Ensuite, chacun y rajoute sa pâte. C'est pourquoi on considère que toutes les chansons sont composées par le groupe. En général, on écrit avec nos émotions. On les considère d'ailleurs comme du carburant. En tout cas, moi, je ne peux écrire que sous le coup de l'émotion. Après, je dégage un thème, et je bosse dessus. Quand je regarde ce que j'ai pu écrire avant, je me rends compte aujourd'hui de l'évolution. Je suis trentenaire maintenant, et mes chansons parlent des angoisses de cet âge...

Tu penses à ce que pourrait être l'après Debout sur le Zinc par exemple ? Le métier de musicien peut s'avérer précaire...
Tout à fait. Mais aujourd'hui, tu peux me donner un boulot qui te paraît pas précaire ? Même si tu as un super travail dans une super boîte, qui te dit que dans deux ans ce ne sera pas fini ? La précarité, c'est le lot de tout le monde. C'est vrai que je pense beaucoup à ce qui se passera après le groupe (j'espère dans très longtemps). Le boulot de musicien, c'est un métier où tu vis au jour le jour, mais à la différence des boulots conventionnels, tu es toujours en devenir. Donc, on verra bien. Pour l'instant, on est bien comme ça, on verra ce que l'avenir nous réserve.

On parlait tout à l'heure du renouveau de la chanson française... Tu ne crains pas que le succès ne coupe, paradoxalement, les groupes de leur public ?
Notamment avec des tarifs de concerts qui ont doublé en trois ans (17 euros pour DSLZ, 20 euros pour Les ogres de Barback)...
La question est légitime. Tu sais, on a commencé à jouer dans la rue, puis les petits bars. Les spectacles qu'on propose aujourd'hui n'ont plus rien à voir. Il y a tout le matériel, la logistique... On est quand même 11 sur les routes. Il y a trois techniciens en son et lumière qui nous suivent, plus le régisseur. Et puis, les salles parisiennes sont tellement chères à louer qu'à 17 euros la place, à 500 personnes, on perd encore de l'argent. C'est le prix à payer si on veut jouer à Paris. On ne se fait de l'argent que sur les tournées en province et sur les ventes de disque.

J'aimerais que tu nous parle du collectif Spiritless...
(rires). Où est-ce que t'es allé dénicher ça ? Spiritless Power, de son vrai nom, c'est l'ancien nom de Debout sur le Zinc. C'était il y a plus de dix ans ça. William (contrebasse) ne jouait pas encore avec nous. Sur les forums, il y a des fans qui s'échangent des vieux titres. C'est rigolo d'ailleurs de se dire que Debout sur le Zinc a de véritables fans... Mais bon, ça reste bon enfant, du deuxième degré...